Graines de lin et activité physique : quels bénéfices sur notre microbiote intestinal ?

Bleu-Blanc-Coeur

26/07/23
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Article proposé par Claire Plissonneau, chercheure en contrat post-doctoral à l’Université Concordia, Montréal.

Impact des maladies inflammatoires sur le microbiote intestinal

Les maladies inflammatoires chroniques, dont fait partie l’obésité, ont vu leurs prévalences augmenter fortement ces dernières décennies dans les pays occidentaux et les pays en voie de développement. Les maladies inflammatoires chroniques ont un effet délétère sur la barrière intestinale et le microbiote intestinal (Cani et al., 2011 ; Everard et al., 2013). Elles engendrent une dysbiose, c’est-à-dire une diminution de la diversité bactérienne présente dans le microbiote intestinal avec une diminution d’espèces bactériennes bénéfiques au profit de bactéries plus néfastes pour l’homme.

Le déséquilibre nutritionnel présent aujourd’hui dans le régime occidental est un des facteurs clés de cette dysbiose du microbiote intestinal, accompagné aussi par l’augmentation de la sédentarité dans la population générale. Le régime occidental est défini comme un régime hyperlipidique riche en oméga 6, acides gras saturés et pauvre en oméga 3 et fibres.

Le rôle anti-inflammatoire des oméga 3 est aujourd’hui bien décrits dans la littérature scientifique (Simopoulos 2002, Calder, 2013). Des recommandations ont été mises en place par l’ANSES pour la population française. Ils recommandent ainsi :

  • Apport d’oméga 3 de type ALA à hauteur de 1 % des apports énergétiques sans alcool (soit environ 2,2g pour un adulte ingérant 2000 kcal par jour)
  • Apport d’oméga 3 de type EPA+DHA : minimum 500 mg dont 250 mg de DHA.
  • Ratio oméga 6/oméga 3 < 4 pour potentialiser les effets bénéfiques des oméga 3

Les oméga 3 peuvent moduler le microbiote intestinal

Depuis quelques années, les chercheurs se penchent sur les effets des oméga 3 sur le microbiote intestinal et la barrière intestinale. Selon les premières études, les oméga 3 auraient divers effets bénéfiques au niveau des cellules intestinales et sur la préservation de la barrière intestinale (Durkin et al., 2021).

La caractérisation des effets des oméga 3 sur la composition et la fonction du microbiote intestinal doit encore être approfondie. En effet, dans les études scientifiques, différentes sources et quantités d’oméga 3 sont utilisées (Bidu et al., 2018 ; Caesar et al., 2015 ; Ghosh et al., 2013 ; Wang et al., 2020), ce qui engendre une hétérogénéité des résultats selon les protocoles mis en place. Les oméga 3 sont en général apportés sous forme :

  • de lin (huile ou graine), de chia, …
  • de poisson, périlla ou krill
  • ou sous forme d’ALA, EPA et DHA purifiés

La majorité des résultats montrent tout de même une modulation bénéfique pour l’hôte du microbiote intestinal, que ce soit en situation pathologique ou en situation saine. Les oméga 3 sont donc une stratégie nutritionnelle intéressante pour moduler de façon bénéfique le microbiote intestinal, notamment dans un contexte de pathologies inflammatoires chroniques associées à une dysbiose du microbiote intestinal. Néanmoins, d’autres études sont nécessaires pour déterminer les sources préférentielles ainsi que les doses pour optimiser l’effet des oméga 3 sur le microbiote intestinal.

Vous souhaitez approfondir le sujet ?

Visionnez le replay du webinaire Bleu-Blanc-Cœur « Les bienfaits des oméga 3 sur le microbiote du sol à l’intestin » animé par Véronique Liesse (diététicienne et ambassadrice Bleu-Blanc-Coeur) et Pierre Weill (président de Bleu-Blanc-Cœur) !

Effets matrices de la graine de lin (des oméga 3 mais pas seulement !)

La graine de lin est une des graines les plus riches en oméga 3 et son huile est composée à plus de 50 % du précurseur de tous les oméga 3, l’acide α-linolénique (ALA). La graine de lin est considérée comme une matrice contenant également bien d’autres composés comme des fibres, protéines, mucilages (substances végétales qui deviennent gélatineuses en présence d’eau) et des précurseurs de lignanes, tel que le diglucoside de secoisolaricirésinol (SDG), un phytoœstrogène.

Lors de la digestion des graines de lin, des lignanes sont produites à partir du SDG, puis absorbées dans le côlon (Mazur et al., 2000). Ce sont certaines espèces bactériennes présentes dans le microbiote intestinal qui permettent cette production de lignanes, comme certains Bacteroides et Ruminococcus (Clavel et al., 2007, Lagkouvardos et al., 2015, Wang et al., 2010). La production des lignanes résulte donc de la composition du microbiote intestinal de chaque individu. Il a aussi été montré que certains Lactobacillus augmenterait l’absorption des lignanes dans le côlon (Munoz et al., 2018).

Les lignanes sont des composés phénoliques qui proviennent principalement des aliments à base de plantes. Ces composés ne sont pas des nutriments comme les glucides, les lipides et les protéines, mais ils possèdent tout de même diverses activités biologiques bénéfiques pour le corps humain.

Encore peu d’études ont montré les effets bénéfiques des lignanes, mais les premiers résultats montrent que les lignanes ont un effet anti-inflammatoire et permettrait de réduire le stress oxydant (Corsini et al., 2010). De plus, elles ont un effet positif sur la barrière intestinale et permettent de la préserver tout en augmentant la production d’acides gras à chaines courtes, bénéfiques pour la santé (Corsini et al., 2010, Fuentealba et al., 2014).

D’autres études montrent que la matrice entière de la graine de lin serait nécessaire pour la production complète des lignanes (Taibi et al., 2021, Fuentealba et al., 2014). De plus, il a été rapporté que la farine de lin serait plus efficace que des graines de lin entières. En effet, la farine de lin augmenterait la libération du SDG pour une meilleure métabolisation dans le côlon (Fuentealba et al., 2014).

L’apport des graines de lin et du SDG ont aussi un impact positif sur le microbiote intestinal et permettent la croissance des espèces bactérienne nécessaires à la production des lignanes. Un cercle vertueux se mettrait donc en place lors d’apports en lin dans l’alimentation.

La graine de lin, par sa matrice complexe (riche en ALA mais aussi en SDG et autres composés), associée aux activités coopératives d’un microbiote intestinal diversifié, semblerait avoir un effet bénéfique sur notre santé.

Graines de lin et activité physique : Une combinaison gagnante ?

La pratique d’une activité physique régulière est depuis longtemps reconnue pour avoir un impact bénéfique sur la composition corporelle, l’équilibre glycémique, le profil lipidique, le statut inflammatoire, la régulation du stress oxydant, mais aussi sur le bien-être et la qualité de vie (Hawley et al., 2014). Depuis quelques années, les études montrent l’impact de l’activité physique seule sur la modulation du microbiote intestinal de manière positive en augmentant l’abondance de bactéries bénéfiques et en diminuant l’abondance de bactéries plus néfastes (Gosh et al., 2013 ; Allen et al., 2018). L’activité physique, en situation de pathologies inflammatoires chroniques, exerce un impact bénéfique pour la santé, mais peut aussi être optimisé par un rééquilibrage nutritionnel quantitatif et qualitatif en oméga 3.

Lors de mon doctorat, en collaboration avec Valorex®, nous avons étudié l’effet d’un apport en oméga 3, par la graine de lin, associé une activité physique chez la souris. Nos résultats ont confirmé les effets anti-inflammatoires des oméga 3 et l’effet de l’activité physique sur la perte de poids et plus spécifiquement de la masse grasse.

Nos travaux ont également montré un effet majeur de l’exercice intermittent de haute intensité et de la graine de lin extrudée (farines à base de lin produites par Valorex® et certifiées Bleu-Blanc-Cœur) sur la modulation de la composition du microbiote intestinal chez la souris. Nous avons trouvé un effet synergique de l’exercice intermittent de haute intensité et de l’huile de lin sur la diversité du microbiote intestinal et en particulier sur l’abondance du genre bactérien Oscillospira spp. Plusieurs études montrent qu’une augmentation de l’abondance de ce genre bactérienserait positivement associé à une bonne santé chez l’humain (pour revue : Yang et al., 2021). De plus, la graine de lin extrudée a permis l’augmentation de l’abondance des genres bactériens Ruminococcus spp. et Prevotella spp., genres bactériens aussi bénéfiques pour la santé dont l’abondance est, entre autres, respectivement liée à la production de lignanes et à l’apport de fibres dans l’alimentation.

Ces premiers résultats montrent qu’un apport en lin, et particulièrement sous forme de graines extrudées, associé à une activité physique imposée et suffisamment intense, seraient efficaces pour moduler bénéfiquement le microbiote intestinal de l’hôte.

Vous souhaitez en savoir plus sur les travaux de Claire Plissonneau ?

Visionnez le résumé de sa thèse en 180 secondes ici ainsi que ses 2 articles associés :

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